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ÉDOUARD III.

— semble stérile, aride, infertile, infécond, desséché ; — là, au contraire, où la terre superficielle se vante — de ses parfums exquis et de sa richesse multicolore, — creusez là, et vous reconnaîtrez que cette éclatante exubérance — émane de l’ordure et des flancs de la corruption. — Pour conclure ma trop longue comparaison, — cette âpre muraille n’annonce pas — ce qu’elle recèle ; elle n’est qu’un manteau qui abrite — contre le temps d’orage la fière parure de dessous. — Toi, qui as une grâce que mes paroles ne sauraient exprimer, — décide-toi toi-même à résider un moment chez moi.

édouard.

— Aussi spirituelle que belle ! Quelle folle passion pourrait se faire entendre — quand l’esprit monte la garde à la porte de la beauté ? — Comtesse, quoique mes affaires me réclament ; — elles seront ajournées, tant que je séjournerai près de toi. — Allons, milords, je logerai ici cette nuit.

Ils sortent.

SCÈNE III.
[Les jardins du château de Roxburgh.]
Entre Lodowick.
lodowick.

— Ses regards, j’ai pu m’en apercevoir, sont perdus dans les regards de la comtesse ; — son oreille savoure tout ce qui émane de cette bouche bien-aimée ; — et mille émotions diverses ; pareilles à ces nuées capricieuses — qui, étendues sur la roue des vents ; — meurent en se dilatant, se succèdent sur ses joues troublées. — Tenez ! quand elle rougissait, aussitôt il devenait pâle, — comme si ces jolies joues, par quelque pouvoir magique, — avaient aspiré le sang ver-