Page:Shakespeare, apocryphes - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 2.djvu/299

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SCÈNE III.

blackwill.

— Oui, tu vois qu’elle est fendue, pas vrai ?

shakebag.

— Il était posté contre une boutique, guettant la venue d’Arden, — quand un apprenti a fait tomber le châssis de sa fenêtre et l’a atteint à la tête. — Sur quoi s’est élevée une querelle, et dans le tumulte — Arden s’est échappé inaperçu. — Mais sursis n’est pas quittance. — Une autre fois nous ferons l’affaire, je te le garantis.

greene.

— Je t’en prie, Will, lave ton front sanglant, — et avisons un autre endroit — où l’on puisse commodément accoster Arden. — Rappelle-toi avec quelle ferveur tu as juré — de tuer le misérable. Songe à ton serment.

blackwill.

— Baste ! j’ai rompu cinq cents serments ! — Mais, si tu veux me fasciner pour l’accomplissement de cette action, — parle-moi de l’or, cette prime de ma résolution. — Montre-moi Mosby s’agenouillant à mes genoux — et s’attachant à mon service pour cette haute entreprise ; — montre-moi cette chère Alice Arden, son tablier plein d’écus, — s’approchant, en me saluant jusqu’a terre, — pour me dire : « Accepte tout ceci, rien que pour ton trimestre, — je veux t’offrir ce tribut d’une année. » — Ah ! cela suffirait pour acérer la plus molle couardise, — un vice dont Blackwill n’a pas encore été atteint. — Je te le déclare, Greene, le voyageur égaré — dont les lèvres sont collées par la chaleur brûlante de l’été — n’est pas plus impatient d’apercevoir une eau vive — que je ne le suis de finir la tragédie d’Arden. — Vois-tu ce caillot qui adhère à mon visage ? — Eh bien, je ne laverai pas cette tache sanglante, — que le cœur d’Arden ne soit resté palpitant dans ma main.