Page:Shakespeare, apocryphes - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 2.djvu/342

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ARDEN DE FEVERSHAM.

À moi, Will ! Je suis touché !

mosby.

— C’est vous, mistress Arden, que je dois remercier de cette blessure.

Mosby, Blackwill et Shakebag sortent.
alice.

— Ah ! Arden, quelle folie t’a aveuglé ! — Ah ! jaloux écervelé, qu’as-tu fait ? — Quand, pour te faire fête, — nous venions gracieusement au devant de toi, — tu tires ton épée, enragé de jalousie, — et tu blesses ton ami — qui était bien loin de penser à mal. — Tout cela pour un serrement de mains, pour un méchant baiser — échangé par plaisanterie afin d’éprouver ta patience ! — Ah ! malheureuse que je suis d’avoir imaginé cette farce — qui, commencée dans le rire, a fini dans le sang !

francklin.

— Morbleu ! Dieu me préserve de plaisanteries pareilles !

alice.

— Ne nous voyais-tu pas te sourire affectueusement, — alors que nous joignions nos mains et que je baisais sa joue ? — Ne m’as-tu pas dernièrement trouvée extrêmement aimable ? — Ne m’as-tu pas entendue crier : on assassine mon mari ! — N’ai-je pas appelé du secours pour te dégager ? — Non ! tes oreilles, comme tout ton être, étaient ensorcelées. Ah ! quelle malédiction — d’être enchaînée par l’amour à un homme en démence ! — Désormais je serai ton esclave, et non plus ta femme : — car, sous ce doux nom, jamais je ne te contenterai. — Si je suis gaie, aussitôt tu me crois légère. — Suis-je triste ? tu dis que la maussaderie me trouble. — Bien habillée ? Tu me crois galante. — Simplement mise ? Je te fais l’effet d’une souillon. — Ainsi, je suis sans cesse, et je serai toute ma vie, — pauvrette, la victime de ton injustice !