Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 6.djvu/396

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tere n’ôte rien de l’intérêt qu’il inspire. On s’attache a lui comme il l’Alceste du Misanthrope, a un grand caractère victime d’une qualité que Pimpètuosité de son humeur et la préoccupation de ses propres idées ont tourne en défaut. On voit le brave Hotspur acceptant l’entreprise qu’on lui propose avant de la connaître, certain du succès dès qu’il’est frappé de l’idée de l’action ; on le voit perdant successivement tous les appuis sur lesquels il avait compté, abandonne ou trahi par ceux qui l’ont entraîne dans le danger, et comme poussé par une sorte de fatalité vers l’abîme qu’il n’aperçoit qu’au moment ou il n’est plus temps de reculer, et où il tombe en ne regrettant que sa gloire. (Test la sans doute une catastrophe tragique, et le fond de la première pièce, qui a pour sujet le premier pas de Henri V vers la gloire, en exigeait une d e ce›genre ; mais la peinture des égarements de la jeunesse du prince n’en forme pas moins la partie la plus importante de fourrage, dont le caractère principal est Falslalf. Falstaff est l’un des personnages les plus célèbres de la comédie anglaise. et peut-être aucun théâtre n’en o[l’re-t-il un plus gai. Ce serait un spectacle assez triste que celui des emportements d’une jeunesse aussi désordonnée que celle de Henri V, dans des mœurs aussi rudes que celles de son temps, si, au milieu de cette grossière débauche, des habitudes et des prétentions d’un genre plus releve ne venaient former un contraste et jouer un rôle d’autant plus amusant qu’il est déplace. Il eût été fort moral, sans doute, de faire porter, sur le prince qui s’avilit, le ridicule de cette inconvenance ; mais quand Shakspeare n’eùt pas été le poete de la cour d’Angleterre, ni la vraisemblance ni l’art ne lui permettaient de dégrader un personnage tel que Henri V ; il a soin, au contraire, de lui conserver partout la hauteur de son caractère et la supériorité de sa position ; et Falstalf, destiné ît nous amuser, n’est admis dans la pièce que pour lè divertissement du prince. p

Fait pou’r être un homme de bonne compagnie, Falstaff n’a pas encore renoncé il toutes ses prétentions en ce genre : il n’a point adopté la grossièreté des situations ou le rabaissent ses vices ; il leur a tout livré, excepté son amour-propre ; il ne s’est point fait un mérite de sa crapule, il n’a point mis sa vanité dans les exploits Cllllll bandit : les manières et les qualités d’un gentilhomme, c’est encore a cela qu’il tiendrait s’il pouvait tenir a quelque chose ; c’est il cela qu’il prétendrait s’il lui était permis d’aveir, ou possible de soutenir une prétention. Du moins veut-il se donner le plaisir de les affecter toutes, dût ce plaisir lui valoir un alfront ; sans y croire, sans espérer qu’on le croie, il faut tt tout prix qu’il réjouisse ses oreilles de