Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1863, tome 4.djvu/395

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je le reconnais à ce qu’il se cure les dents[1].

AUTOLYCUS.—Et ce paquet, qu’y a-t-il dans ce paquet ? Pourquoi ce coffre ?

LE BERGER.—Monsieur, il y a dans ce paquet et cette boîte des secrets qui ne doivent être connus que du roi, et qu’il va apprendre avant une heure, si je peux parvenir à lui parler.

AUTOLYCUS.—Vieillard, tu as perdu tes peines.

LE BERGER.—Pourquoi, monsieur ?

AUTOLYCUS.—Le roi n’est point au palais ; il est allé à bord d’un vaisseau neuf pour purger sa mélancolie et prendre l’air : car, si tu peux comprendre les choses sérieuses, il faut que tu saches que le roi est dans le chagrin.

LE BERGER.—On le dit, monsieur, à l’occasion de son fils, qui voulait se marier à la fille d’un berger.

AUTOLYCUS.—Si ce berger n’est pas dans les fers, qu’il fuie promptement ; les malédictions qu’il aura, les tortures qu’on lui fera souffrir, briseront le dos d’un homme et le cœur d’un monstre.

LE FILS.—Le croyez-vous, monsieur ?

AUTOLYCUS.—Et ce ne sera pas seulement lui qui souffrira tout ce que l’imagination peut inventer de fâcheux et la vengeance d’amer, mais aussi ses parents, quand ils seraient éloignés jusqu’au cinquantième degré, tous tomberont sous la main du bourreau. Et quoique ce soit une grande pitié, cependant c’est nécessaire. Un vieux maraud de gardien de brebis, un entremetteur de béliers, consentir que sa fille s’élève jusqu’à la majesté royale ! Quelques-uns disent qu’il sera lapidé, mais moi je dis que c’est une mort trop douce pour lui : porter notre trône dans un parc à moutons ! Il n’y a pas assez de morts, la plus cruelle est trop aisée.

LE FILS.—Ce vieux berger a-t-il un fils, monsieur ? l’avez-vous entendu dire, s’il vous plaît, monsieur ?

AUTOLYCUS.—Il a un fils qui sera écorché vif ; ensuite, enduit partout de miel et placé à l’entrée d’un nid de

  1. Manière de petit-maître, du temps de Shakspeare.