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ACTE IV, SCÈNE I.

d’un amour pareil à celui d’aujourd’hui, l’antre le plus sombre, le lieu le plus propice, les plus fortes suggestions de notre plus mauvais génie, rien ne pourra amollir mon honneur jusqu’à des désirs impurs ; rien ne me fera consentir à dépouiller de son vif aiguillon ce jour de la célébration, que je passerai à imaginer que les coursiers de Phoebus se sont fourbus, ou que la nuit demeure là-bas enchaînée.

Prospero.

Noblement parlé. Assieds-toi donc, et cause avec elle ; elle est à toi. — Allons, Ariel, mon ingénieux serviteur, mon Ariel !

(Entre Ariel.)
Ariel.

Que désire mon puissant maître ? me voici.

Prospero.

Toi et les esprits que tu commandes, vous avez tous dignement rempli votre dernier emploi. J’ai besoin de vous encore pour un autre artifice du même genre. Pars, et amène ici, dans ce lieu, tout ce menu peuple des esprits sur lesquels je t’ai donné pouvoir. Anime-les à de rapides mouvements, car il faut que je fasse voir à ce jeune couple quelques-uns des prestiges de mon art. C’est ma promesse, et ils l’attendent de moi.

Ariel.

Immédiatement ?

Prospero.

Oui, dans un clin d’œil.

Ariel.

Vous n’aurez pas dit va et reviens, et respiré deux fois et crié allons, allons, que chacun, accourant à pas légers sur la pointe du pied, sera devant vous avec sa moue et ses grimaces. M’aimez-vous, mon maître ? non ?

Prospero.

Tendrement, mon joli Ariel. N’approche pas que tu ne m’entendes appeler.

Ariel.

Oui, je comprends.

(Il sort.)
Prospero, à Ferdinand.

Songe à tenir ta parole ; ne donne pas trop de liberté à tes caresses : lorsque le sang est enflammé, les serments les plus forts ne sont plus que de la paille. Sois plus retenu, ou autrement bonsoir à votre promesse.

Ferdinand.

Je la garantis, seigneur. Le froid virginal