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ACTE IV, SCÈNE III.

velles de Rome ? J’étais chargé par le sénat volsque d’aller vous y chercher : vous m’avez fort heureusement épargné une journée de chemin.

le romain.—Il y a eu à Rome d’étranges insurrections : le peuple soulevé contre les sénateurs, les patriciens et les nobles.

le volsque.—Il y a eu, dites-vous ? Elles sont donc à leur terme ? Notre sénat ne le croit pas : on presse, les préparatifs de guerre, et l’on espère fondre sur les Romains au plus chaud de leurs divisions.

le romain.—Le plus fort du feu est passé : mais il ne faut qu’une étincelle pour rallumer l’incendie ; car les nobles prennent si à cœur le bannissement du brave Coriolan, qu’ils sont tous disposés à ôter au peuple son pouvoir ; et à lui enlever ses tribuns pour jamais. Le feu couve sous la cendre, je puis vous l’assurer, et il est près d’éclater avec violence.

le volsque.—Coriolan banni ?

le romain.—Oui, il est banni.

le volsque.—Avec cette nouvelle, Nicanor, vous êtes sûr d’être bien reçu.

le romain.—L’occasion est bonne pour les Volsques. J’ai entendu dire que le moment le plus favorable pour séduire une femme, c’est quand elle est en querelle avec son mari. Votre noble Tullus Aufidius va figurer avec avantage dans cette guerre, à présent que son grand adversaire Coriolan n’a plus ni crédit ni emploi dans sa patrie.

le volsque.—Il ne peut manquer d’y briller. Je me félicite de cette rencontre inattendue : grâce à vous, ma commission est remplie, et je vais vous accompagner avec joie jusqu’à mon logis.

le romain.—D’ici au souper, je vous apprendrai bien des nouvelles de Rome qui vous surprendront, et qui toutes tendent à l’avantage de ses ennemis. N’avez-vous pas, disiez-vous, une armée prête à marcher ?

le volsque.—Une armée superbe ; les centurions ont déjà reçu leurs commissions et leur paye ; ils ont l’ordre d’être sur pied une heure après le premier signal.