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ÉTUDE

interligne, non pas le meilleur de ses lits, mais le second après le meilleur[1]. Une distraction semblable, réparée de la même manière, se fait remarquer à l’égard de Burbadge, Hemynge et Condell, les seuls de ses camarades de théâtre dont il fasse mention ; il lègue à chacun d’eux, aussi dans un interligne, trente-six schellings pour avoir une bague. Burbadge, le premier acteur de son temps, avait contribué au succès des pièces de Shakspeare ; Hemynge et Condell ont donné, sept ans après sa mort, la première édition complète de ses œuvres dramatiques.

Cette singulière omission du nom de la femme de Shakspeare, si légèrement réparée, indique peut-être plus que de l’oubli ; on est tenté de la regarder comme le signe d’un éloignement ou d’un ressentiment dont l’approche seule de la mort a pu engager le poëte à adoucir un peu la manifestation.

La seconde fille de Shakspeare, Judith, mariée à un marchand de vin, reçut une part beaucoup moins considérable que madame Hall, sa sœur, de l’héritage de leur père. Fut-ce en qualité d’aînée, ou par une prédilection particulière que Shakspeare voulut ainsi avantager Susanna ? Une épitaphe gravée sur le tombeau de celle-ci, morte en 1649, la représente comme « spirituelle au delà de la portée de son sexe, » et ayant en cela « quelque chose de Shakspeare, » mais plus encore en ce qu’elle était « sage pour le salut et pleurait avec tous ceux qui pleuraient. » Rien ne nous est parvenu sur Judith, sinon qu’elle ne savait pas écrire, fait constaté par un acte encore existant, où elle a apposé une croix ou quelque autre signe analogue, indiqué par une note marginale comme « le signe de Judith Shakspeare. » Judith laissa trois fils qui moururent sans enfants. Susanna n’eut qu’une fille, mariée d’abord à Thomas Nash et ensuite

  1. The second best.