Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 1.djvu/135

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LA REINE.

Mon bon seigneur, soyez bref.

CORAMBIS.

Oui, madame. Monseigneur, j’ai une fille, — je l’ai tant qu’elle est mienne ; car, ce dont nous nous croyons — le plus sûr, souvent nous le perdons : maintenant au prince. — Monseigneur, veuillez seulement parcourir cette lettre — que ma fille, par obéissance, — a remise entre mes mains.

LE ROI.

Lisez, mylord.

CORAMBIS.

Suivez-bien, monseigneur.

« Doute que le feu soit dans la terre,
« Doute que les astres se meuvent,
« Doute que la vérité soit la vérité,
« Mais ne doute pas de mon amour.

« À la belle Ofélia : — À toi pour jamais, le très-malheureux prince Hamlet. » — Monseigneur, que pensez-vous de moi ? — Oui, que pensez-vous de moi, quand j’ai vu ceci ?

LE ROI.

Ce que je dois penser d’un véritable ami, d’un sujet dévoué.

CORAMBIS.

Je serais heureux de l’être toujours. — Sur ce, quand j’ai vu cette lettre, j’ai dit ceci à ma fille : — « Le seigneur Hamlet est un prince hors de votre étoile, — un trop grand personnage pour votre amour. » — Conséquemment je lui ai ordonné de refuser ses lettres, — de renvoyer ses cadeaux, et de disparaître. — Elle m’a obéi comme un enfant obéissant. — Quant à lui, depuis cette époque, se voyant ainsi traversé dans son amour,