Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 1.djvu/150

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ferait partager par tous sa passion. — Et moi, pourtant, espèce d’âne et de Jeannot rêveur, — moi dont le père a été égorgé par un scélérat, — je me tiens tranquille et je laisse passer cela. Ah ! lâche que je suis ! — qui veut me tirer par la barbe ou me tordre le nez, — me jeter un démenti par la gorge en pleine poitrine ? Pour sûr, je garderais la chose. Il faut que je n’aie pas de fiel ! — autrement, j’aurais engraissé tous les milans du ciel — avec les entrailles de ce drôle ! Damné scélérat ! — traître ! luxurieux ! meurtrier scélérat ! — Oui-dà, il est brave à moi, le fils de ce père chéri, — de me borner, comme une coureuse, comme un marmiton, — à ces invectives !… En campagne, ma cervelle ! — J’ai entendu dire que des créatures coupables, assistant à une pièce de théâtre, — ont été amenées par l’action seule de la scène — à avouer un meurtre commis longtemps auparavant. — L’esprit que j’ai vu pourrait bien être le démon : — et peut-être, abusant de ma faiblesse et de ma mélancolie, — grâce au pouvoir qu’il a sur des hommes comme moi, — cherche-t-il à me damner. Je veux avoir des preuves plus fortes. — Cette pièce est la chose — où j’attrapperai la conscience du roi.
Il sort.

SCÈNE VIII.
[Une autre salle dans le château.]
Entrent le Roi, la Reine et les Seigneurs.
LE ROI.

Seigneurs, vous ne pouvez donc, par aucun moyen, trouver — la cause de la démence de notre fils Hamlet ? — Vous que l’affection rapproche de lui depuis sa jeu-