Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/98

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MACBETH.

Si nous allions échouer ?

LADY MACBETH.

Nous, échouer ? — Chevillez seulement votre courage au point résistant, — et nous n’échouerons pas. Lorsque Duncan sera endormi, — (et le rude voyage d’aujourd’hui va l’inviter bien vite — à un somme profond), j’aurai raison — de ses deux chambellans avec du vin et de l’ale, — à ce point que la mémoire, gardienne de leur cervelle, — ne sera que fumée, et le récipient de leur raison — qu’un alambic. Quand le sommeil du porc — tiendra gisant, comme une mort, leur être submergé, — que ne pourrons-nous, vous et moi, exécuter — sur Duncan sans défense ? Que ne pourrons-nous imputer — à ses officiers, placés là, comme des éponges, pour absorber le crime — de ce grand meurtre ?

MACBETH.

Ne mets au monde que des enfants mâles ! — car ta nature intrépide ne doit former — que des hommes… Ne sera-t-il pas admis par tous, — quand nous aurons marqué de sang ses deux — chambellans endormis et employé leurs propres poignards, — que ce sont eux qui ont fait la chose ?

LADY MACBETH.

Qui osera admettre le contraire, — quand nous ferons rugir notre douleur et nos lamentations — sur sa mort ?

MACBETH.

Me voilà résolu : je vais tendre — tous les ressorts de mon être vers cet acte terrible. — Allons, et jouons notre monde par la plus sereine apparence. — Un visage faux doit cacher ce que sait un cœur faux.

Ils sortent.