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SCÈNE XI.
Par ce moyen j’ai vu quelles étaient les bourses de meilleure mine ; et ce que j’ai vu, je m’en suis souvenu pour mon profit. Mon paysan, à qui il ne manque que peu de chose pour être un homme raisonnable, était tellement amoureux de la chanson de ces filles, qu’il n’a pas voulu remuer une patte avant d’avoir eu l’air et les paroles. Ce qui a attiré à moi le reste du troupeau, si bien que chacun est devenu tout oreille. Vous auriez pu pincer une jupe, sans que nulle le sentît ; rien n’était plus facile que de soutirer une bourse d’une braguette. J’aurais pu subtiliser des clefs attachées à des chaînes. On n’avait plus d’ouïe, plus de sens, que pour la chanson de monsieur, et plus d’admiration que pour ce néant ! Aussi ai-je profité de cette léthargie pour vider et couper la plupart des bourses en fête ; et, si le vieux n’était pas survenu en clabaudant contre sa fille et le fils du roi, et n’avait pas effaré mes pigeons, je n’aurais pas laissé une bourse en vie dans toute l’armée.
Camillo, Florizel et Perdita reviennent sur le devant de la scène.
CAMILLO, à Florizel.

— Oui, mais mes lettres, étant par ce moyen arrivées — en même temps que vous, dissiperont ce doute.

FLORIZEL.

— Et celles que le roi Léonte vous répondra…

CAMILLO.

— Satisferont votre père.

PERDITA.

Puissiez-vous réussir ! — Tout ce que vous dites me paraît bien.

CAMILLO, apercevant Autolycus.

Qui avons-nous là ? — Servons-nous de cet homme ; n’omettons rien — de ce qui peut nous aider. —