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CYMBELINE.

BÉLARIUS.

Éloignons-nous-en.

ARVIRAGUS.

— Quel charme, monsieur, trouvons-nous à la vie, pour la soustraire — ainsi à l’action et à l’aventure ?

GUIDÉRIUS.

Oui, quel est notre espoir — en nous cachant ? Si nous suivons cette voie, ou les Romains — nous tueront comme Bretons, ou ils nous admettront — comme des barbares révoltés contre leur patrie — dont il faut se servir, et ils nous tueront après.

BÉLARIUS.

Mes fils, — nous irons plus haut dans les montagnes, afin d’être en sûreté. — Impossible de nous joindre au parti du roi : la mort de Cloten — si récente nous expose, nous qui ne sommes pas connus ni enrôlés — dans les rangs, à être questionnés sur le lieu — où nous avons vécu : on nous arrachera — l’aveu de ce que nous avons fait, et la réplique sera pour nous une mort — prolongée par la torture.

GUIDÉRIUS.

Voilà, monsieur, une crainte — peu digne de vous en ce moment, — et peu édifiante pour nous.

ARVIRAGUS.

Est-il vraisemblable — qu’au moment où ils entendent hennir les chevaux des Romains, — où ils aperçoivent les feux de leur camp, où ils ont les yeux — et les oreilles distraits par des choses si importantes, — les Bretons aillent perdre leur temps à nous examiner, — pour savoir d’où nous venons ?

BÉLARIUS.

Oh ! je suis trop connu — dans l’armée. — Je n’avais vu Cloten que tout jeune, et pourtant vous êtes témoins que les années ne l’ont point effacé — de mon souvenir.