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SCÈNE IX.

OTHELLO.

— Et cependant comme une nature dévoyée…

IAGO.

— Oui, voilà le point. Ainsi, à vous parler franchement, — avoir refusé tant de partis qui se proposaient — et qui avaient avec elle toutes ces affinités de patrie, de race et de rang, — dont tous les êtres sont naturellement si avides ! — Hum ! cela décide un goût bien corrompu, — une affreuse dépravation, des pensées dénaturées… — Mais pardon ! Ce n’est pas d’elle précisément que j’entends parler ; — tout ce que je puis craindre, c’est que, son goût revenant à des inclinations plus normales, — elle ne finisse par vous comparer aux personnes — de son pays, et (peut-être) par se repentir.

OTHELLO.

Adieu ! adieu ! — Si tu aperçois du nouveau, fais-le-moi savoir. — Mets ta femme en observation… Laisse-moi, Iago.

IAGO.

— Monseigneur, je prends congé de vous.

Il va pour s’éloigner.
OTHELLO.

— Pourquoi me suis-je marié ? Cet honnête garçon, à coup sûr, — en voit et en sait plus, beaucoup plus qu’il n’en révèle.

IAGO, revenant.

— Monseigneur, je voudrais pouvoir décider Votre Honneur — à ne pas sonder plus avant cette affaire. Laissez agir le temps. — Il est bien juste que Cassio reprenne son emploi, — car assurément il le remplit avec une grande habileté : — pourtant, s’il vous plaît de le tenir quelque temps encore en suspens, — vous pourrez juger l’homme et les moyens qu’il emploie. — Vous remarquerez si votre femme insiste sur sa rentrée au ser-