Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1868, tome 5.djvu/95

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
91
SCÈNE I.
mari bien-aimé, — la colère de mon père m’inquiète, mais, — sauf le saint respect que je lui garde, ce n’est pas — pour moi que je redoute sa rage. Il faut que vous partiez ! — J’affronterai seule ici le feu incessant — de ses regards furieux, soutenue dans la vie — par cette unique pensée qu’il y a au monde un joyau — que je puis revoir encore.
Elle laisse tomber une larme.
POSTHUMUS.

Ma reine ! ma maîtresse ! — Oh ! ne pleurez plus, madame, de peur qu’on ne me soupçonne — avec raison d’avoir plus de tendresse — qu’il ne convient à un homme ! Je resterai — le plus loyal mari qui ait jamais engagé sa foi. — Ma résidence sera à Rome, chez un nommé Philario, — un ami de mon père qui ne m’est connu — que par correspondance. Adressez-moi là vos lettres, ma reine, — et je boirai de mes yeux chaque mot que vous m’écrirez, — l’encre fût-elle du fiel.

La Reine revient.
LA REINE.

Soyez brefs, je vous prie. — Si le roi venait, je ne sais pas jusqu’où irait contre moi — son déplaisir.

À part.

N’importe ! je veux diriger — ses pas par ici. Je ne lui procure jamais une souffrance, — qu’il ne me la paye comme un bienfait : — il achète cher mes cruautés.

Elle sort.
POSTHUMUS.

Quand nous passerions à prendre congé l’un de l’autre — tout le temps qui nous reste encore à vivre, — la douleur de la séparation ne ferait que grandir. Adieu !

IMOGÈNE.

— Non, restez encore un peu : — vous sortiriez pour