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SCÈNE I.
taient ici à outrance quand je suis arrivé ; — j’ai dégainé pour les séparer ; à l’instant même est survenu — le fougueux Tybalt, l’épée haute, — vociférant ses défis à mon oreille, — en même temps qu’il agitait sa lame autour de sa tête et pourfendait l’air — qui narguait son impuissance par un sifflement. — Tandis que nous échangions les coups et les estocades, — sont arrivés des deux côtés de nouveaux partisans qui ont combattu — jusqu’à ce que le prince soit venu les séparer (40).
LADY MONTAGUE.

— Oh ! où est donc Roméo ? l’avez-vous vu aujourd’hui ? — Je suis bien aise qu’il n’ait pas été dans cette bagarre.

BENVOLIO.

— Madame, une heure avant que le soleil sacré — perçât la vitre d’or de l’Orient, — mon esprit agité m’a entraîné à sortir ; — tout en marchant dans le bois de sycomores — qui s’étend à l’ouest de la ville, — j’ai vu votre fils qui s’y promenait déjà ; — je me suis dirigé vers lui, mais, à mon aspect, — il s’est dérobé dans les profondeurs du bois. — Pour moi, jugeant de ses émotions par les miennes, — qui ne sont jamais aussi absorbantes que quand elles sont solitaires, — j’ai suivi ma fantaisie sans poursuivre la sienne, — et j’ai évité volontiers qui me fuyait si volontiers (41).

MONTAGUE.

— Voilà bien des matinées (42) qu’on l’a vu là — augmenter de ses larmes la fraîche rosée du matin — et à force de soupirs ajouter des nuages aux nuages. — Mais, aussitôt que le vivifiant soleil — commence, dans le plus lointain orient, à tirer — les rideaux ombreux du lit de l’Aurore, — vite mon fils accablé fuit la lumière, il rentre, — s’emprisonne dans sa chambre, — ferme ses fenêtres, tire le verrou sur le beau jour, — et