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SCÈNE V.

Cette belle pour qui notre amant gémissait et voulait mourir,
Comparée à la tendre Juliette, a cessé d’être belle.
Maintenant Roméo est aimé de celle qu’il aime :
Et tous deux sont ensorcelés par le charme de leurs regards.
Mais il a besoin de conter ses peines à son ennemie supposée,
Et elle dérobe ce doux appât d’amour sur un hameçon dangereux.
Traité en ennemi, Roméo ne peut avoir un libre accès
Pour soupirer ces vœux que les amants se plaisent à prononcer,
Et Juliette, tout aussi éprise, est plus impuissante encore
À ménager une rencontre entre les amoureux.
Mais la passion leur donne la force, et le temps, l’occasion
De goûter ensemble d’ineffables joies dans d’ineffables transes.

Il sort (66).

SCÈNE VI.
[Une route aux abords du jardin de Capulet.]
Roméo entre précipitamment.
ROMÉO, montrant le mur du jardin.

— Puis-je aller plus loin, quand mon cœur est ici ? — En arrière, masse terrestre, et trouve ton centre.

Il escalade le mur et disparaît.
Entrent Mercutio et Benvolio.
BENVOLIO.

— Roméo ! mon cousin Roméo !

MERCUTIO.

Il a fait sagement. — Sur ma vie, il s’est esquivé pour gagner son lit.

BENVOLIO.

— Il a couru de ce côté et sauté par-dessus le mur de ce jardin. — Appelle-le, bon Mercutio.

MERCUTIO.

Je ferai plus : je vais le conjurer… — Roméo ! caprice !