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ROMÉO ET JULIETTE.
la faculté de penser !) — puis, qu’à force de baisers elle ranimait la vie sur mes lèvres, — et que je renaissais, et que j’étais empereur. — Ciel ! combien doit être douce la possession de l’amour, — si son ombre est déjà si prodigue de joies (122) !
Entre Balthazar.
ROMÉO.

— Des nouvelles de Vérone !… Eh bien, Balthazar, — est-ce que tu ne m’apportes pas de lettre du moine (123) ? — Comment va ma dame ? Mon père est-il bien ? — Comment va madame Juliette ? Je te répète cette question-là ; — car, si ma Juliette est heureuse, il n’existe pas de malheur.

BALTHAZAR.

— Elle est heureuse, il n’existe donc pas de malheur. — Son corps repose dans le tombeau des Capulets, — et son âme immortelle vit avec les anges. — Je l’ai vu déposer dans le caveau de sa famille, — et j’ai pris aussitôt la poste pour vous l’annoncer. — Oh ! pardonnez-moi de vous apporter ces tristes nouvelles : — je remplis l’office dont vous m’aviez chargé, monsieur (124).

ROMÉO.

— Est-ce ainsi ? eh bien, astres, je vous défie !…

À Balthazar.

— Tu sais où je loge : procure-moi de l’encre et du papier, — et loue des chevaux de poste : je pars d’ici ce soir (125).

BALTHAZAR.

— Je vous en conjure, monsieur, ayez de la patience. — Votre pâleur, votre air hagard annonce — quelque catastrophe.

ROMÉO.

Bah ! tu te trompes !… — Laisse-moi et fais ce que je