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NOTES.

quelles le nom de Shakespeare est tout naturellement attaché : Hamlet, Une Sauvage apprivoisée, la veille du jour où la troupe du lord amiral donne une pièce de Marlowe. Mais Malone n’accepte pas cette interprétation si vraisemblable. Malone affirme que cet Hamlet et cette Sauvage apprivoisée ne sont pas les œuvres de Shakespeare, mais seulement deux pièces sur lesquelles Shakespeare a copié les siennes. « Il est clair, dit-il, qu’aucune des pièces de notre auteur ne fut jouée à Newington Butts ; si on en avait joué une seule, nous en aurions certainement trouvé plus d’une. Le vieil Hamlet avait été mis sur la scène avant 1590. » Et voilà Shakespeare convaincu, par cette simple affirmation de son commentateur, d’avoir plagié deux de ses principales pièces ! — Mais, malheureusement pour l’infaillibilité de Malone et heureusement pour la mémoire de Shakespeare, on découvrit en 1825 un exemplaire in-quarto de ce vieil Hamlet, joué à Newington Butts en 1594. Ce vieil Hamlet, imprimé pour Nicholas Ling, ce vieil Hamlet, que Malone déclarait n’être pas de Shakespeare, était signé en toutes lettres William Shakespeare ! Fiez-vous donc aux commentateurs, après cela !

Ainsi tout le monde le reconnaît aujourd’hui, ce que Malone affirmait quant au vieil Hamlet, était justement le contraire de la vérité. Eh bien ! ma conviction profonde, c’est que Malone s’est trompé sur le compte de la Sauvage apprivoisée primitive, comme sur le compte du vieil Hamlet. Ma conviction, c’est que les deux pièces jouées le 9 et le 11 juin 1594 sur la scène de Newington sont l’une et l’autre de Shakespeare, et que le grand homme n’a pas plus plagié la comédie que le drame.

À l’appui de ma conviction, voici un fait frappant que les commentateurs ont jusqu’ici passé sous silence.

Le lecteur sait déjà que la Sauvage apprivoisée primitive a été publiée en 1594 par Cuthbert Burby. En 1598, le même Cuthbert Burby publie Peines d’amour perdues, et, en 1599, Roméo et Juliette.

Sept années plus tard, en 1606, la propriété de ces trois pièces est cédée le même jour à un autre libraire, Nicholas Ling, déjà éditeur d’Hamlet. Voici l’extrait du registre officiel tenu au Stationer’s Hall :

Jan 22, 1606.
M. Ling. Romeo and Juliett.
Love’s Labour Loste.
Taming of a Shrewe (la comédie primitive).

Vingt-deux mois plus tard, un nouveau transfert s’opère. Le droit