Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1869, tome 6.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
61
61
INTRODUCTION.

ont peine à contenir leur joie. — Douce camaraderie de honte ! chuchote l’un. — Un ivrogne aime toujours un ivrogne comme lui, murmure l’autre.

Mais chut ! quel est ce nouveau bruit ? Eh ! c’est cet excellent Du Maine qui arrive en déclamant, lui aussi… Longueville, fils d’Ève comme le roi et comme Biron, n’a que le temps de se précipiter dans un taillis pour se tenir aux aguets :

Ne m’accuse pas d’un péché,
Si je me parjure pour toi,
Toi, près de qui Jupiter jurerait
Que Junon n’est qu’une Éthiopienne ;
Toi, pour qui, voulant être mortel,
Il nierait être Jupiter !

La situation atteint alors le plus haut comique. À peine Du Maine a-t-il éventé son bouquet à Chloris-Catherine, que Longueville sort de sa cachette et lui fait une scène. À son tour, le roi quitte son arbre et fait une scène à Longueville. Sur quoi, Biron dégringole de son chêne, tombe au milieu de tous comme la foudre, et fait une scène au roi, à Longueville et à Du Maine. Biron a la raillerie cruelle : il se moque des trois amoureux avec une verve impitoyable. « À quel spectacle il a assisté ! de quelle patience il a fait preuve pour voir si tranquillement un roi se transformant en bourdon, le grand Hercule pirouettant une ronde et le profond Salomon entonnant une gigue !… Où est ton mal ? Oh ! dis, bon Du Maine ? Où souffres-tu, gentil Longueville ? Où souffre mon roi ? Dans la poitrine ? Holà, du gruau ! »

Mais… rira bien qui rira le dernier ! Biron n’a pas eu le temps d’achever sa réjouissante apostrophe que voici venir, tout essoufflé, ce butor de Trogne, apportant une lettre qui, à ce que prétend M. le curé, contient une tra-