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TIMON D'ATHÈNES.

votre flamme impure domine sa fumée, — et ne renonce jamais. Comme diversion à ces peines, puissiez-vous, six mois durant, — en éprouver d’autres. Puis donnez pour chaume à vos pauvres faîtes dénudés — la dépouille des morts (21) ; eussent-ils été pendus, — n’importe ! portez-la pour trahir et vous prostituer encore ! — Fardez-vous au point qu’un cheval puisse s’embourber sur votre visage : — peste soit des rides !

phryné et timandra.

— Bon, encore de l’or !… Après ? — Crois bien que nous ferons tout pour l’or.

timon.

— Semez les germes de la consomption — jusque dans les os de l’homme ; frappez ses tibias alertes, — et énervez sa virilité. Cassez la voix du légiste, — qu’il ne puisse plus plaider le faux, — ni glapir ses arguties. Empestez le flamine — qui récrimine contre la chair, — et ne se croit pas lui-même. Faites tomber, — faites tomber le nez, gangrené jusqu’à l’os, — de celui qui, afin de poursuivre ses intérêts, — quitte la piste du bien public. Rendez chauves les rufians à la tête frisée ; — et que les fanfarons épargnés par la guerre — vous doivent de souffrir. Infectez tous les hommes ; — que votre activité épuise et tarisse — la source de toute érection !… Voici encore de l’or. — Damnez les autres, et que cet or vous damne, — et que les fossés vous servent à tous de tombeaux !

phryné et timandra.

— Encore des conseils et encore de l’argent, généreux Timon !

timon.

— Commencez par vous prostituer encore, par faire le mal encore : je vous ai donné des arrhes.

alcibiade.

— Battez, tambours ! En marche sur Athènes !… Adieu, Timon. — Si je réussis, je viendrai te revoir encore.