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LE PÈLERIN PASSIONNÉ.

Adonis avait coutume de baigner sa mélancolie. Chaude était la journée ; plus chaude encore la déesse, guettant le mortel qui si souvent était venu là.

Sur-le-champ il arrive, jette de côté son manteau, et s’arrête tout nu sur le bord verdoyant du ruisseau ; le soleil dardait sur le monde un regard splendide, mais moins ardent que celui dont la royale Vénus dévorait Adonis.

Lui l’aperçoit et d’un bond s’élance dans l’eau. « Ô Jupiter ! s’écrie-t-elle, que n’étais-je la source ! »

III

Belle était la matinée où apparut la belle reine d’amour, plus pâle que sa blanche colombe, de la douleur que lui causait Adonis, jouvenceau altier et farouche.

Elle prend position sur une colline escarpée ; vite Adonis arrive, au son du cor, avec sa meute. Elle, la reine affolée, avec une sollicitude plus que tendre, défend à l’enfant d’aller plus loin :

« Une fois, dit-elle, j’ai vu un beau jeune homme, ici, dans ces halliers, blessé grièvement à la cuisse par un sanglier ; spectacle douloureux ! Regarde ma cuisse, ajoute-t-elle, c’est là qu’était la plaie. »

Et elle lui montrait sa cuisse ; Adonis y vit plus d’une cicatrice, et s’enfuit rougissant, et la laissa toute seule.

IV

Vénus, ayant le jeune Adonis assis près d’elle, à l’ombre d’un myrte, se mit à l’entreprendre ; elle dit au jouvenceau comment le dieu Mars la pressait et, comme Mars se jetait sur elle, elle se jetait sur Adonis.

« Ainsi, dit-elle, m’embrassait le dieu de la guerre. »