mes amours, et toutes les tendres effusions de ma tendresse, et toutes ces affections que je croyais ensevelies.
Que de larmes saintes et funèbres a dérobées à mes yeux un tendre et religieux attachement, intérêt payé à des morts qui ne sont maintenant pour moi que des êtres lointains qui gisent cachés en toi !
Tu es la tombe où vit mon amour enseveli, décorée du trophée de mes affections passées qui t’ont rendu chacune la part qu’elles avaient de moi. Le bien de tant d’autres est désormais tout à toi.
Je vois en toi les images que j’ai aimées, et toi, les réunissant toutes, tu me possèdes tout entier.
XLVI
Mieux vaut ici-bas être vil que de passer pour vil, alors que, ne l’étant pas, on subit le reproche de l’être. Le bonheur le plus légitime est condamné, quand il est jugé, non par notre conscience, mais par l’opinion d’autrui.
Pourquoi faut-il que les regards faux et viciés du monde s’inclinent sur ma fantaisie, ou que dans mes faiblesses j’aie des espions plus faibles que moi qui, selon leur caprice, jugent mauvais ce que je trouve bon ?
Non, je suis ce que je suis : et ceux qui s’attaquent à mes fautes ne font que me prêter les leurs. Je puis encore être droit, bien qu’eux-mêmes soient tortueux, et mes actions ne doivent pas être jugées sur leurs pensées grossières.