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CORIOLAN.

ménénius.

Puisque vous parlez d’orgueil… Vous ne vous fâcherez pas ?

les deux tribuns.

Dites, dites, monsieur, dites.

ménénius.

D’ailleurs, peu importe : car le plus mince filou de prétexte est capable de vous dépouiller de toute votre patience. Lâchez les rênes de votre humeur, et fâchez-vous à plaisir, du moins si c’est un plaisir pour vous de vous fâcher. Vous reprochez à Marcius d’être orgueilleux ?

brutus.

Nous ne sommes pas seuls à le faire, monsieur.

ménémus.

Je sais que vous savez faire bien peu de choses, seuls : il vous faut nombre d’assistances, sans quoi vos actions seraient merveilleusement rares ; vos facultés sont trop dans l’enfance, pour que seuls vous puissiez faire beaucoup. Vous parlez d’orgueil, besaciers ! Oh ! Si vous pouviez jeter vos regards par-dessus vos épaules et faire la revue intérieure de vos personnes ! Oh ! si vous le pouviez…

brutus.

Eh bien, après, monsieur ?

ménénius.

Eh bien, vous apercevriez deux magistrats (alias, deux sots), incapables, orgueilleux, violents et têtus, comme personne à Rome.

sicinius.

Vous aussi, Ménénius, vous êtes suffisamment connu.

ménénius.

Je suis connu pour être un patricien de belle humeur, aimant une coupe de vin ardent que n’a pas refroidi une goutte du Tibre ; ayant, dit-on, le léger défaut de céder au premier élan ; vif et prenant feu à la plus triviale excitation ;