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CORIOLAN.

le citoyen.

— Vous aussi !

coriolan.

Indiquez-moi, s’il vous plaît, — où demeure le grand Aufidius ; est-il à Antium ?

le citoyen.

— Oui, et il festoie les nobles de l’État, — dans sa maison, ce soir même.

coriolan.

Où est sa maison, je vous prie ?

le citoyen.

— Ici, devant vous.

coriolan.

Merci, monsieur. Adieu !

Le citoyen sort.

— Ô monde, que tu as de brusques vicissitudes ! Deux amis jurés, — qui semblent en ce moment n’avoir qu’un cœur dans leur double poitrine, — à qui les loisirs, le lit, les repas, les exercices, — tout est commun, dont l’amour a fait comme des jumeaux — inséparables, avant une heure, — pour une discussion d’obole, s’emporteront — jusqu’à la plus amère inimitié. De même, des adversaires furieux, — qu’empêchaient de dormir leur passion et leur acharnement — à s’entre-détruire, à la première occasion, — pour une billevesée valant à peine une écaille, deviendront les plus tendres amis, — et marieront ensemble leurs enfants. Il en est ainsi de moi : — je hais mon pays natal, et mes sympathies sont pour — cette ville ennemie.

Se dirigeant vers la maison d’Aufidius.

Entrons ! s’il me tue, — il aura fait justice de moi ; s’il m’accueille, — je servirai son pays.

Il entre dans la maison (13).