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LE ROI LEAR.

Allons, entre… Moi, je vais prier, et puis dormir (52).

Le fou entre dans la hutte.

— Pauvres indigents tout nus, où que vous soyez, — vous que ne cesse de lapider cet impitoyable orage, — têtes inabritées, estomacs inassouvis, — comment, sous vos guenilles trouées et percées à jour, vous défendez-vous — contre des temps pareils ? Oh ! j’ai pris — trop peu de souci de cela… Luxe, essaie du remède ; — expose-toi à souffrir ce que souffrent les misérables, — pour savoir ensuite leur émietter ton superflu — et leur montrer des cieux plus justes.

edgar, de l’intérieur de la hutte.

— Une brasse et demie ! une brasse et demie !… Pauvre Tom !

Le fou s’élance effaré hors de la cabane.
le fou.

— N’entre pas là, m’n oncle, il y a un esprit. — À l’aide ! à l’aide !

kent.

Donne-moi ta main. Qui est là ?

le fou.

— Un esprit, un esprit ; il dit qu’il s’appelle pauvre Tom.

kent, à l’entrée de la hutte.

— Qui es-tu, toi qui grognes là dans la paille ? Sors.


Entre Edgar, vêtu avec le désordre d’un homme en démence.
edgar.

— Arrière ! le noir démon me suit ! — À travers l’aubépine hérissée souffle le vent glacial. — Humph ! va donc te réchauffer sur un lit si froid.

lear.

— Tu as donc tout donné à tes deux filles, — que tu en es venu là ?