— Approche, ami : où est le roi, mon maître ?
Ici, seigneur, mais ne le dérangez pas, sa raison est partie.
— Je t’en prie, mon bon ami, enlève-le dans tes bras. — J’ai surpris un complot contre sa vie. — Il y a ici une litière toute prête, étends-le dedans, — et conduis-le à Douvres, ami : là, tu trouveras — hospitalité et protection. Enlève ton maître. — Si tu tardes une demi-heure, sa vie, — la tienne et celle de quiconque osera le défendre — sont sûrement perdues. Emporte-le, emporte-le, — et suis-moi, que je te conduise bien vite hors de danger (61).
La nature accablée s’assoupit. — Ce repos aurait pu être un baume sauveur pour sa raison brisée ; — si les circonstances le troublent, — la guérison sera difficile.
Allons, aide-moi à porter ton maître ; — tu ne dois pas rester en arrière.
Allons, allons, en marche !
— Quand nous voyons nos supérieurs partager nos misères, — à peine nos malheurs nous semblent-ils ennemis. — Celui qui souffre seul, souffre surtout par imagination, — en pensant aux destinées privilégiées, aux éclatants bonheurs qu’il laisse derrière lui ; — mais l’âme dompte aisément la souffrance, — quand sa douleur a des camarades d’épreuve. — Comme ma peine me semble légère et to-