vous l’ayez déjà entendue. — Mais, comme elle sert à mes fins, je me risquerai — à la débiter encore.
Soit ! je l’entendrai, monsieur ; mais ne croyez pas leurrer notre misère avec une fable. N’importe ! si ça vous plaît, narrez toujours.
— Un jour, tous les membres du corps humain — se mutinèrent contre le ventre, l’accusant et se plaignant — de ce que lui seul il demeurait — au milieu du corps, paresseux et inactif, — absorbant comme un gouffre la nourriture, sans jamais porter — sa part du labeur commun, là où tous les autres organes — s’occupaient de voir, d’entendre, de penser, de diriger, de marcher, de sentir — et de subvenir, par leur mutuel concours, — aux appétits et aux désirs communs — du corps entier. Le ventre répondit…
— Voyons, monsieur, quelle réponse fit le ventre ?
— Je vais vous le dire, monsieur. Avec une espèce de sourire — qui ne venait pas de la rate, mais de certaine région — (car, après tout, je puis aussi bien faire sourire le ventre — que le faire parler), il répondit dédaigneusement — aux membres mécontents, à ces mutins — qui se récriaient contre ses accaparements, exactement — comme vous récriminez contre nos sénateurs parce qu’ils — ne sont pas traités comme vous…
Voyons la réponse du ventre… Quoi ! — si la tête portant couronne royale, l’œil vigilant, — le cœur, notre conseiller, le bras, notre soldat, — le pied, notre coursier, notre trompette, la langue, — et tant d’autres menus auxiliaires qui défendent — notre constitution, si tous…