Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1873, tome 12.djvu/333

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henry v.

— De tout mon cœur, mon bon frère de France. — Secrétaire, remettez-lui une copie.

Le roi de France et sa suite sortent.

— Milords d’Angleterre, allez devant, je vous suis.

Les lords sortent.
henry v, se parlant à lui-même.

— Ah ! Harry, trois fois malheureux Harry ! — tu viens de vaincre le roi de France, — et il faut que tu commences un nouveau démêlé avec sa fille ! — Mais de quel front pourras-tu chercher à obtenir son amour, — toi qui as cherché à prendre la couronne de son père ? — La couronne de son père, ai-je dit ! Non, c’est la mienne. — Oui, mais j’aime Catherine, et il faut que je la sollicite ; — je l’aime, et je veux l’avoir.

Entrent la princesse Catherine et ses dames.

— Mais la voici qui vient. — Eh bien, belle dame Catherine de France, — quelles nouvelles ?

catherine.

— Sous le bon plaisir de Votre Majesté, — mon père m’envoie savoir si vous consentez à rabattre quelques-unes — des prétentions déraisonnables que vous émettez.

henry v.

— Ah ! ma foi, Kate, — je félicite ton père de son esprit ; — car personne au monde ne pourrait mieux que toi me décider à les rabattre, — si la chose était possible. — Mais, dis-moi, douce Kate, sais-tu comment on aime ?

catherine.

— Je ne saurais haïr, mon bon seigneur ; — par conséquent il ne me siérait point d’aimer.

henry v.

— Bah ! Kate, réponds-moi en termes nets, — saurais-tu aimer le roi d’Angleterre ? — Je ne puis faire ce qu’on fait en ces contrées, — perdre la moitié du temps à faire ma cour. — Non, fillette, je ne suis pas de cette humeur-là. — Mais veux-tu partir pour l’Angleterre ?

catherine.

— Plût à Dieu que l’amour me fît maître de Votre Majesté — comme la guerre vous a fait maître de mon père ! — Je ne vous accorderais pas un regard, — que vous n’eussiez rétracté toutes ces demandes déraisonnables.

henry v.

— Bah ! Kate, tu ne voudrais pas, je le sais, me traiter si durement. — Mais, dis-moi, pourrais-tu aimer le roi d’Angleterre ?

catherine.

— Comment aimerais-je l’homme qui a traité si durement mon père ?