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SCÈNE XIX.

feste.

Pour cette fois, monsieur, mettez Votre Grâce dans votre poche, et que la chair et le sang obéissent !

le duc.

Soit ! je consens à commettre le péché de duplicité ; voici encore de l’or.

feste.

Primo, secundo, tertio ! voilà le beau jeu ! Un vieux proverbe dit que le troisième coup répare tout. Le triplex, monsieur, c’est une mesure fort dansante ; les carillons de Saint-Benoît vous le rappelleraient au besoin, monsieur. Une, deux, trois !

le duc.

Pour le coup, vous ne m’escamoterez plus d’argent ; si vous voulez faire savoir à votre maîtresse que j’attends ici pour lui parler, et si vous la ramenez avec vous, peut-être ma munificence s’éveillera-t-elle encore.

feste.

Eh bien, monsieur, bercez votre munificence jusqu’à ce que je revienne. Je pars, monsieur ; mais je ne voudrais pas que tous pussiez supposer que mon désir de posséder est péché de convoitise ; pourtant, comme vous dites, que votre munificence fasse un petit somme, je vais la réveiller tout à l’heure.

Il sort.
Entrent Antonio et des officiers de justice.
viola.

— Seigneur, voilà l’homme qui est venu à ma rescousse.

le duc.

— Je me rappelle bien sa figure ; — pourtant, la dernière fois que je l’ai vue, elle était charbonnée, — comme la face noire de Vulcain, par la fumée de la guerre ; — il était le capitaine d’un chétif navire — dont le faible tirant