Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1867, tome 3.djvu/35

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28 COMME IL VOUS PLAIRA.

SCÈNE IIL.

Une chambre dans le palais.

Entrent CÉLIA et ROSALINDE.

CÉLIA. — Eh bien, cousine ; en bien, Rosalinde ! Cupidon, ayez pitié de nous ! Quoi, pas un mot ?

ROSALINDE. — Pas un seul à jeter à un chien. — -CÉLIA. — Non, tes paroles sont trop précieuses pour être jetées aux chiens, mais jette-m’en quelques-unes à moi ; allons, estropie-moi de tes raisons.

ROSALINDE. — Ali bien ! si je faisais cela, 0 y aurait deux cousines forcées de garder la chambre ; l’une serait •estropiée par des raisons et l’autre folle sans raison.

CÉLIA. — Est-ce que tous ces chagrins sont JÎOUT votre père ?

ROSALINDE. — Non, il y en a quelques-uns pour l’enfant de mon père*. Oh ! comme chacun des jours ouvrables " de ce monde est rempli de ronces ! " "■

CÉLIA. — Ce ne sont que des chardons, cousine, qui ont été lancés sur toi par une gaieté de dimanches ; si nous ne marchons pas dans les sentiers battus, ils s’accrocheront à nos jupes.

ROSALINDE..— : Je pourrais les secouer de mes jupes ; mais, ces chardons sont dans mon cœur. . CÉLIA. — Crache-les.

ROSALINDE. — J’essaj’erais, si en faisant hum, hum, je pouvais les faire sortir.

CÉLIA. *— Voyons, voyons, lutte avec tes sentiments.

ROSALINDE. — Oh ! ils prennent le parti d’un meilleur lutteur que moi-même !

CÉLIA. — Oh ! bonne chance à vous deux ! vous essayerez la lutte un jour au risque d’une chute. Mais laissons là ces plaisanteries qui ne servent à rien et parlons sérieusement. Est-il possible que si subitement