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30 COMME IL VOUS PLAIRA.

que je sois coupable de trahison : dites-moi où sont -les preuves de mon crime.

1 LE DUC FRÉDÉRIC. — Tu es la fille de ton père, cela suffit.

ROSALINDE. — C’est ce que j’étais lorsque Votre Altesse prit son duché, c’est ce que j’étais lorsque Votre Aitesse l’exila. La trahison n’est pas un mal héréditaire, . Monseigneur, et même en admettant que nous la tenions de nos parents, qu’ai-je à.voir en cela ? mon père n’était pas un traître : donc, mon bon Suzerain, ne me jugez pas si mal (jue de prendre ma pauvreté pour une trahison,

CÉLIA. — Cher Souverain, écoutez-moi.

LE DUC FRÉDÉRIC — Oui, Célia, c’est par affection pour vous que nous l’avons gardée ; sans cela, elle serait partie avec son père.

CÉLIA^ — Ce n’est pas moi qui alors vous suppliai de la garder ; ce furent voire bon plaisir et votre propre pitié qui la firent rester. J’étais trop jeune alors pour l’apprécier ; mais maintenant je la connais ; si elle est coupable de trahison, en bien ! moi aussi j’en suis coupable ; nous —avons toujours- dormi- ensemblé, — nous -nous- sommes levées ensemble, nous avons étudié, joué, pris nos repas ensemble, et partout où nous sommes allées, on nous a toujours vues accouplées et inséparables comme les cygnes de Juhon. "

LE DUC FRÉDÉRIC. — Elle est trop.rusée pour toi, et sa douceur, son silence mêjne et sa patience parlent au peuple qui s’apitoye sur elle. Tu es une sotte ; elle te yole ta renommée, et tu paraîtras bien plus brillante et bien plus vertueuse lorsqu’elle sera partie. Donc, n’ouvre pas ■les lèvres" ; ferme et irrévocable est la décision que je prononce sur elle ; elle est bannie. — -.

CÉLIA. — Alors, prononcez aussi cette sentence sur moi, mon Suzerain ; je ne puis vivre privée de sa com■ pagnie.

LE DUC FàÉDÊRïc." — "Vous êtes une sôttë". — " Vous, ma nièce, faites vos préparatifs ; si vousdépassezle temps que j’ai dit, sur mon honneur et par tout ce que ma pa-