Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1867, tome 3.djvu/382

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mes aînés en condition, et cependant, je ne voudrais pas me comparer à un vieillard.

Messire Tobie. — Quelle est la mesure de ton talent à la gaillarde, chevalier ?

Messire André. — Ma foi, je puis y découper des sauts de chevreau.

Messire Tobie. — Et moi y découper du mouton.

Messire André. — Et je crois que je fais le saut en arrière aussi solidement qu’homme qui vive en Illyrie, tout simplement.

Messire Tobie. — Pourquoi ces choses sont-elles cachées ? pourquoi ces dons ont-ils un rideau devant eux ? est-ce qu’il y a danger qu’ils prennent la poussière comme le portrait de Mme Mail ? Pourquoi ne vas-tu pas à l’église en dansant une gaillarde et n’en reviens-tu pas en dansant une courante ? Si j’étais comme toi, ma promenade ne serait qu’une gigue ; je ne lacherais même pas de l’eau sans danser un pas de cinq. À quoi penses-tu donc ? est-ce que c’est un monde où il faille cacher ses vertus ? Je me doutais bien, en voyant l’excellente constitution de ta jambe, qu’elle avait été formée sous l’étoile de la gaillarde.

Messire André. — Oui, elle est solide et elle fait assez bon effet avec un bas couleur de flamme. Allons-nous nous amuser un peu ?

Messire Tobie. — Pourrions-nous faire autre chose ? Ne sommes-nous pas nés sous le signe du Taureau ?

Messire André. — Le Taureau ! Ceux qui naissent sous ce signe sont tout côtes et tout cœur.

Messire Tobie. — Non, Monsieur, mais tout jambes et tout cuisses. Laisse-moi te voir cabrioler. Ah ! plus haut. Ah ! ah 1 excellent ! (Ils sortent.)