Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1867, tome 3.djvu/426

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Antonio. — Demain, Monsieur ; il vaut mieux vous chercher d’abord un logement.

Sébastien. — Je ne suis pas fatigué et il y a loin d’ici à la nuit : jc vous en prie, allons assouvir nos veux de la vue des monuments et des choses Fameuses qui renomment cette ville.

Antonio. — Veuilles me pardonner : je ne pourrais me montrer dans ces rues sans danger ; autrefois, dans un combat sur mer, contre les galères du comte, j’ai rendu certains services et de telle importance, en vérité, que si j’étais pris ici, mon procès serait bien vite instruit.

Sébastien. — Sans doute vous avez tué un grand nombre de ses hommes ?

Antonio. — Mon offense n’est pas de nature si sanglante, quoique la nature des circonstances et de la querelle eût pu nous fournir de sanglants arguments. Depuis lors, cette offense aurait pu être réparée en restituant ce que nous leur avions pris, et c’est ce que firent la plupart des habitants de notre ville pour l’intérêt du commerce ; moi seul, je n y consentis pas ; aussi le payerai-je cher, si je suis surpris rôdant dans cette ville.

Sébastien. — En ce cas ne vous montrez pas trop ouvertement.

Antonio. — En effet, cela ne me convient pas. Tenez, Monsieur, voici ma bourse. Les meilleurs logements sont à l’Éléphant dans le faubourg du Sud : je vais commander notre dîner pendant que vous tromperez le temps et que vous nourrirez votre érudition de l’inspection de cette ville : c’est là que vous me trouverez.

Sébastien. — Pourquoi votre bourse ?

Antonio. — Peut-être votre œil s’arrètera-t-il sur quelque bagatelle que vous aurez désir d’acheter, et je suppose bien que vos fonds ne sont pas assez considérables pour être consacrés à d’inutiles emplettes, Monsieur.

Sébastien. — Je vais donc être votre portebourse et vous laisser pour une heure.

Antonio. — A l’Éléphant,

Sébastien. — Je m’en souviendrai. (Ils sortent.}