Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1867, tome 3.djvu/445

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comme des poutres et les grandes fenêtres vers le sud-nord sont lumineuses comme l’ébène, et cependant tu te plains de n’y pas voir ?

Malvolio, de l’intérieur. — Je ne suis pas fou, Messire Topas ; je vous dis que cette chambre est noire.

Le Bouffon. — Tu erres, insensé : je te dis qu’il n’y a d’autres ténèbres que l’ignorance, en laquelle tu es plus empêtré que les Egyptiens dans leur brouillard.

Malvolio, de l’intérieur. — Je dis que cette chambre est aussi noire que l’ignorance, l’ignorance fût-elle aussi noire qu’un puits de bitume, et je dis que jamais homme ne fut outragé à ce point. Je ne suis pas plus fou que vous l’êtes : mettez-moi à l’épreuve par telle question que vous voudrez qui exigera du raisonnement.

Le Bouffon. — Quelle est l’opinion de Pythagore concernant le gibier à plumes ?

Malvolio, de l’intérieur. — Que l’âme de notre grand’mère peut-être habite un oiseau.

Le Bouffon. — Que penses-tu de son opinion ?

Malvolio, de l’intérieur. — Je pense noblement de l’âme et je ne puis en aucune façon approuver son opinion.

Le Bouffon. — Porte-toi bien. Continue à rester dans les ténèbres ; avant que je consente à te croire dans ton bon sens, tu devras partager l’opinion de Pythagore et craindre de tuer un coq de bruyère, de peur de déloger l’Ame de ta grand’mère. Porte-toi bien.

Malvolio, de l’intérieur. — Messire Topas, Messire Topas….

Messire Tobie. — Mon très-exquis Messire Topas !

Le Bouffon. — Certes, et je suis bon pour tous les rôles.

Maria. — Tu aurais pu jouer celui là sans ta robe et ta barbe ; il ne te voit pas.

Messire Tobie. — Parle-lui avec ta propre voix et viens me dire comment tu l’as trouvé : je voudrais que nous lussions convenablement débarrassés de cette polissonnerie. Si on peut le délivrer sans inconvénient, j’y consens volontiers, car je suis tout à l’heure si mal avec ma nièce