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ŒUVRES EN PROSE

ments qui dépouillés de l’auréole aérienne que leur prête le talent, paraîtraient des scènes triviales et banales. Nous nous contenterons donc de choisir quelques passages propres à donner une idée du talent que possède l’auteur. Le portrait suivant de la naïve et intéressante Rosalie est digne du peintre le plus habile.

« Sa chevelure était d’un noir parfait ; elle avait vraiment la nuance du corbeau, et ces mêmes teintes miroitantes, ce même mélange de pourpre et de noir qui rend si remarquable le plumage de cet oiseau se retrouvaient dans les longues et mobiles tresses qui tombaient de sa tête sur ses épaules. Son teint était foncé et uni : les couleurs qui composaient la nuance brune dont était pénétrée sa peau satinée, étaient si heureusement combinées que pas une tache, pas une altération de teinte n’en déparait l’éclat ; et quand la rougeur de l’animation ou de la modestie venait à ses joues, la couleur en était si rare que si un peintre avait pu en imprégner son pinceau, ce seul coloris eût suffit à le rendre immortel. L’os, au-dessus de ses yeux, formait un angle bien net, avec une belle courbure : et moi qui ai tant admiré les étonnantes propriétés des courbes, je suis convaincu que toutes leurs merveilles réunies fussent restées bien loin de ce contour enchanteur. Le sourcil était crayonné avec une extrême finesse ; le centre en était du noir le plus foncé, tandis que les bords étaient à peine visibles, et personne n’eût été assez hardi pour indiquer l’endroit précis où il se terminait. Bref la draperie