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Page:Shelley - Œuvres poétiques complètes, t3, 1887, trad. Rabbe.djvu/107

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PETITS POÈMES

connais aucun frein ! Si même j’étais comme dans mon enfance, et pouvais être le camarade de tes courses errantes à travers le ciel, comme au temps où devancer ta rapidité céleste semblait à peine un rêve ; je n’aurais jamais songé à t’importuner ainsi de mes prières dans mon douloureux besoin. Oh ! soulève-moi comme une vague, une feuille, un nuage ! Je tombe sur les épines de la vie ! Je saigne ! Le lourd poids des heures a enchaîné et courbé un être trop semblable à toi, indompté, rapide et fier !

Fais de moi ta lyre, comme est la forêt. Mes feuilles ne tombent-elles pas comme les siennes ? Le tumulte de tes puissantes harmonies nous empruntera à tous deux un profond accent automnal, doux, bien qu’imprégné de tristesse. Sois, ô Esprit superbe, mon propre esprit ! Sois moi ! être impétueux ! Entraîne mes pensées mortes sur l’univers, comme des feuilles flétries, pour hâter une nouvelle naissance ; et, par l’incantation de ces vers, disperse, comme des cendres et des étincelles d’un foyer inextinguible, mes paroles parmi l’humanité ! Sois à travers mes lèvres, pour la terre encore assoupie, la trompette d’une prophétie ! Ô Vent, si l’Hiver s’approche, le Printemps peut-il être loin derrière ?


EXHORTATION[1]

Les caméléons se nourrissent de lumière et d’air ; la

  1. M. Rossetti présume avec raison que ce poème est celui que Shelley envoya à Mistress Gisborne le 8 mai 1820 avec la remarque suivante : « En excuse de mon incurable stupidité, je vous envoie ce petit rien sur les poètes ; il pourra aussi servir d’excuse pour Wordsworth. »