Page:Silvestre de Sacy - Calila et Dimna, ou Fables de Bidpai, 1816.djvu/45

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chercher cette herbe merveilleuse ; qu’arrivé dans ce pays, après bien des recherches infructueuses, Barzouyèh reconnut enfin que ce n’étoit là qu’une allégorie, et que, sous l’emblème de cette herbe, il falloit entendre le livre de Calila, dont les sages leçons pourvoient retirer les insensés de la mort de l’ignorance. Cette tradition est aussi celle qu’a suivie l’auteur du Schah-namèh. Au contraire, suivant notre texte Arabe, avec lequel sont d’accord et la version Grecque de. Siméon Seth et la traduction Persane d’Abou’Imaali Nasr-allah, ce fut Nouschiréwan qui, ayant entendu parler avec éloge du livre de Calila, envoya Barzouyèh dans l’Inde, pour qu’il se procurât ce trésor de sagesse, et l’apportât en Perse. Cependant Nasr-allah rapporte le même emblème, sans le rattacher aucunement à Barzouyèh et à sa mission dans l’Inde.

Il est difficile de croire que cette allégorie ne se fût pas dans quelques exemplaires de la version Arabe ; ce n’est guère que de là qu’elle a pu passer dans la version Hébraïque et dans l’ancienne traduction Espagnole. On pourrait supposer qu’il en étoit question dans un passage du chapitre dont nous parlons en ce moment : on y lit en effet, page 44 de mon édition, que Barzouyèh, dans sa jeunesse, avoit déjà fait un premier voyage dans l’Inde, pour y rechercher des substances médicinales et des simples, et que c’étoit dans ce voyage qu’il avoit acquis la connoissance de la langue et de l’écriture Indiennes[1]. Mais cette supposition est inutile ; car j’ai sous les yeux un manuscrit Arabe du livre de Calila où se trouve, au commencement de ce chapitre, le même récit qu’a suivi l’auteur du Schah-namèh ; c’est le manuscrit 139 de S.t-Germain-des-Prés. Voici comment ce chapitre commence dans ce manuscrit :

ذڪوا انـه انوشـروان فر زمن الاعاجم ابن قباد اللك رجل يقال له
  1. Dans la traduction de Siméon Seth, ce passage s’applique au voyage fait dans l’Inde par ordre de Nouschiréwan. On y lit : ἀπό τε τῆς γεννήσεως αὐτοῦ καὶ τῆς μαθήσεως καὶ τῆς παιδεύσεως αὐτοῦ, μέχρις ὥρας ἧς ἀπεστάλη παρὰ τοῦ βασιλέως εἰς Ἰνδίαν. Le texte Arabe distingue expressément les deux voyages.