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L’ÉCRIN DISPARU

Inutile de rappeler, ajouta le détective, d’une voix un peu voilée, la scène qui eut lieu quelques heures plus tard entre le père, revenu à lui, et le fils, qui, absent au moment du drame sanglant, était réapparu un peu plus tard… Le père accusa l’enfant d’avoir volé l’écrin ; celui-ci soutint n’y avoir dérobé qu’une bague, laissant les cinq autres intactes.

Au cours de cet étrange conflit, le père, de nouveau, perdit connaissance et dans la confusion qui en fut la suite, le fils disparut, et depuis, nul n’en a entendu parler. — Tel est, en substance, n’est-il pas vrai, cher Monsieur, l’événement qui fit sensation dans le quartier des affaires à Montréal, il y a eu exactement neuf ans au mois de Juillet dernier ?… Et voilà environ trois mois que vous vîntes me le conter à moi, ajoutant que Rodolphe Raimbaud, contrairement à ce que tout le monde croyait, n’était pas l’auteur de la disparition de l’écrin, et qu’il portait injustement le poids d’une faute, dont un autre était coupable.

Vous m’aviez alors prié de démêler cette énigme, ce qui n’était pas chose aisée, après un si grand laps de temps. — Or, j’ajoute ce que vous ne m’aviez pas dit alors : que ce Rodolphe Raimbaud n’était autre que vous-même, l’ayant deviné de suite.

Hippolyte Paillard ne nia point. À quoi bon ? Il se contenta d’un geste qui voulait dire : « Continuez ».

Maintenant, Monsieur, pour arriver à la complète lumière, je dois vous présenter mes excuses d’être obligé de raviver en vous des souvenirs pénibles ; mais il le faut, dans l’intérêt de la vérité que nous poursuivons. Du reste, vous avez devant vous un homme qui, par vocation, est tenu au secret professionnel, non moins étroitement que le confesseur.

À quel moment avez-vous distrait de l’écrin, le joyau en question ?

Le jeune homme ne songea pas un instant à se soustraire à un interrogatoire dont il prévoyait la nécessité.

— Entre une heure et demie et deux, alors que mon père étant monté dans sa chambre, m’avait laissé la charge de l’office et du magasin. Le matin, je l’avais vu placer l’écrin dans le tiroir. Dès que mon père descendit, je quittai la maison à son insu.

— De sorte que s’il y a eu vol de l’écrin, la chose n’a pu avoir lieu qu’entre deux et six heures ?

— C’est l’évidence même.

— Ce prétendu vol, n’aurait-il pu être commis par un habitué de la maison ?