Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/226

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tretienne pour le temps où il n’a rien à faire, mais le dédommage encore en quelque sorte des moments de souci et de découragement que lui cause quelquefois la pensée d’une situation aussi précaire[1]. Aussi, dans les lieux où le gain de la plupart des ouvriers de manufactures se trouve être presque au niveau des salaires journaliers des simples manœuvres, celui des maçons, est en général, de la moitié ou du double plus élevé. Quand les simples manœuvres gagnent 4 et 5 schellings par semaine, les maçons en gagnent fréquemment 7 et 8 ; quand les premiers en gagnent 6, les autres en gagnent souvent 9 et 10 ; et quand ceux-là en gagnent 9 ou 10, comme à Londres, ceux-ci communément en gagnent 15 et 18. Cependant, il n’y a aucune espèce de métier qui paraisse plus facile à apprendre que celui d’un maçon. On dit que pendant l’été, à Londres, on emploie quelquefois les porteurs de chaises comme maçons en briques. Les hauts salaires de ces ouvriers sont donc moins une récompense de leur habileté, qu’un dédommagement de l’interruption qu’ils éprouvent dans leur emploi.

Le métier de charpentier en bâtiment paraît exiger plus de savoir et de dextérité que celui de maçon. Cependant, en plusieurs endroits, car il n’en est pas de même partout, le salaire journalier du charpentier est un peu moins élevé. Quoique son occupation dépende beaucoup du besoin accidentel que ses pratiques ont de lui, cependant elle n’en dépend pas entièrement, et elle n’est pas sujette à être interrompue par les mauvais temps.

  1. Ce taux du strict nécessaire ne varie pas uniquement à raison du genre de vie plus ou moins passable de l’ouvrier et de sa famille, mais encore à raison de toutes les dépenses regardées comme indispensables dans le pays où il vit. C’est ainsi que l’on met d’abord au rang des dépenses nécessaires celle d’élever des enfants ; il en est d’autres moins impérieusement commandées par la nature des choses, quoiqu’elles le soient au même degré par le sentiment : tel est le soin des vieillards. Dans la classe ouvrière, il est trop négligé. La nature, pour perpétuer le genre humain, ne s’en est rapportée qu’aux impulsions d’un appétit violent, et aux sollicitudes de l’amour paternel ; les vieillards dont elle n’a plus besoin, elle les abandonne à la reconnaissance de leur postérité, après les avoir rendus victimes de l’imprévoyance de leur âge. Si les mœurs d’une nation rendaient indispensable l’obligation de préparer, dans chaque famille, quelque provision pour la vieillesse, comme elle en accorde en général à l’enfance, les besoins de première nécessité étant ainsi un peu plus étendus, le taux naturel des plus bas salaires serait un peu plus fort. J.-B. Say.