Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/297

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qu’elles sont surabondantes dans le pays qui les produit, il arrive fréquemment, même dans l’état actuel du commerce du monde, qu’elles ne soient d’aucune valeur pour le propriétaire de la terre. Une bonne carrière de pierres, dans le voisinage de Londres, fournirait une rente considérable. Dans beaucoup d’endroits de l’Écosse et de la province de Galles, elle n’en rapportera aucune. Le bois propre à la charpente est d’une grande valeur dans un pays bien peuplé et bien cultivé, et la terre qui le produit rapporte une forte rente. Mais, dans plusieurs endroits de l’Amérique septentrionale, le propriétaire saurait très-bon gré à qui voudrait le débarrasser de la plupart de ses gros arbres. Dans quelques endroits des montagnes d’Écosse, faute de moyens de transport par eau ou par terre, l’écorce est la seule partie du bois qu’on puisse envoyer au marché. On y laisse les bois pourrir sur place. Quand il y a une telle surabondance dans les matières de logement, la partie dont on fait usage n’a d’autre valeur que le travail et la dépense employés à la rendre propre au service. Elle ne rapporte aucune rente au propriétaire, qui, en général, en abandonne l’usage à quiconque prend seulement la peine de le lui demander. Cependant, il peut quelquefois être dans le cas d’en retirer une rente, s’il y a demande de la part de nations plus riches. Le pavé des rues de Londres a fourni aux propriétaires de quelques rochers stériles de la côte d’Écosse le moyen de tirer une rente de ce qui n’en avait jamais rapporté auparavant. Les bois de la Norvège et des côtes de la mer Baltique trouvent dans beaucoup d’endroits de la Grande-Bretagne un marché qu’ils ne pourraient pas trouver sur les lieux, et par ce moyen ils fournissent quelque rente à leurs propriétaires.

Les pays ne se peuplent pas en proportion du nombre d’hommes que leur produit pourrait vêtir et loger, mais en raison du nombre que ce produit peut nourrir. Quand la nourriture ne manque pas, il est aisé de trouver les choses nécessaires pour se vêtir et pour se loger ; mais on peut avoir celles-ci en abondance, et éprouver souvent de grandes difficultés à se procurer la nourriture. Dans quelques localités, même en Angleterre, le travail d’un seul homme, dans une seule journée, peut bâtir ce qu’on y appelle une maison. Le vêtement de l’espèce la plus simple, celui de peaux de bêtes, exige un peu plus de travail pour le préparer et le mettre en état de servir ; toutefois, il n’en exige pas encore beaucoup. Chez les peuples sauvages et barbares, la centième partie, ou guère plus, du travail de toute l’année, suffira pour les pourvoir de ce