Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/386

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même proportion que l’industrie et la population du pays. Mais comme le marché pour la laine et les peaux, même dans un pays encore barbare, s’étend souvent à tout le monde commerçant, il ne peut presque jamais s’agrandir dans cette même proportion. L’amélioration d’un pays particulier ne peut plus guère influer sur l’état du monde commerçant, et après cette amélioration le marché pour ces denrées peut rester le même ou à peu près le même qu’il était auparavant. Cependant, dans le cours naturel des choses, cette amélioration doit bien lui donner quelque avantage, surtout si les manufactures dont ces denrées sont les matières premières venaient à fleurir dans le pays ; le marché, sans être fort agrandi par là, se trouverait au moins beaucoup plus rapproché qu’auparavant du lieu où croissent ces matières, et le prix de celles-ci augmenterait au moins de ce qu’on avait eu coutume de dépenser pour les transporter au loin. Ainsi, quoique ce prix ne puisse pas s’élever dans la même proportion que celui de la viande de boucherie, il doit naturellement s’élever de quelque chose, ou du moins il ne doit certainement pas baisser.

Cependant, malgré l’état florissant des manufactures en Angleterre, le prix des laines anglaises a baissé considérablement dans ce pays depuis le temps d’Édouard III. Il y a une foule de preuves authentiques qui démontrent que pendant le règne de ce prince (vers le milieu du quatorzième siècle, ou environ vers 1339), ce qui était regardé comme le prix modéré et raisonnable de la balle ou de vingt-huit livres de laine, poids d’Angleterre, n’était pas à moins de 10 schellings de l’argent d’alors[1], contenant, sur le pied de 20 deniers l’once, 6 onces d’argent, poids de la Tour, valant environ 30 schellings de notre monnaie actuelle. Aujourd’hui, on regarderait 21 schellings comme un bon prix pour la balle de vingt-huit livres de la plus belle laine d’Angleterre. Ainsi, le prix pécuniaire de la laine, au temps d’Édouard III, était à son prix pécuniaire d’aujourd’hui comme 10 est à 7. La supériorité de son prix réel était encore plus forte. Dix schellings étaient dans ce temps-là le prix de douze boisseaux de blé, sur le pied de 6 schellings 8 deniers le quarter. Aujourd’hui, à raison de 28 schellings le quarter, 21 schellings ne valent que six boisseaux. Ainsi la proportion des deux prix réels est comme 12 est à 6, comme 2 est à 1. Une balle de vingt-huit livres

  1. Voyez Mémoires sur la laine, par Smith, vol. I, chap. v, vi et vii, et le vol. II, chap. clxxvi.