Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/486

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Lorsque les billets de sommes aussi petites sont autorisés dans la circulation et sont d’un usage commun, beaucoup de gens du peuple ont l’envie et la possibilité de se faire banquiers. Tel particulier dont les billets pour 5 livres ou même pour 20 schellings ne seraient reçus de personne, viendra à bout de les passer aisément quand ils seront émis pour une somme aussi petite que 6 pence. Mais les banqueroutes fréquentes qui doivent arriver dans une classe de banquiers aussi misérables peuvent donner lieu à de grands inconvénients, et quelquefois même causer de très-grandes calamités parmi beaucoup de pauvres gens qui ont reçu de tels billets en payement.

Il serait peut-être mieux que, dans aucun endroit du royaume, on ne laissât mettre en émission aucun billet de banque au-dessous de 5 livres sterling. Alors, vraisemblablement, par tout le royaume le papier-monnaie se trouverait renfermé dans la circulation entre les différentes personnes employées au commerce, comme il l’est présentement à Londres, où il ne circule pas de billet de banque au-dessous de 10 livres ; 5 livres dans la majeure partie du royaume étant une somme à laquelle on regarde autant et qu’on dépense aussi rarement en une fois, que 10 livres à Londres, vu la profusion et la grande dépense qui règnent dans cette ville, quoique peut-être ces 5 livres, dans le reste du royaume, n’achètent guère pour cela plus de moitié des marchandises que 10 livres achètent à Londres[1].

Il faut observer que, partout où le papier-monnaie est à peu près concentré dans la circulation de commerçant à commerçant, comme à Londres, il y a toujours abondance d’or et d’argent. Partout où ce papier se répand dans la circulation du commerçant au consommateur, comme cela est en Écosse et encore plus dans l’Amérique septentrionale, il chasse presque tout à fait l’or et l’argent du pays, presque toutes les affaires du commerce intérieur allant ainsi avec du papier. La

  1. La banque d’Angleterre a émis pour la première fois des billets de dix livres en 1759, des billets de cinq livres en 1793, et des billets d’une et deux livres en mars 1797. Les billets au-dessous de cinq livres furent pour la plupart retirés de la circulation en 1832. Pendant la crise de 1820, on jugea à propos d’émettre de nouveau pour 1,500,000 livres sterling de billets d’une livre ; mais bientôt une grande quantité de ces billets retournèrent à la Banque. En décembre 1835, il ne restait plus que 282,000 livres sterling de billets d’une livre, dont la plupart ont été perdus ou détruits. Mac Culloch.