Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/240

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retours sont nécessairement moins fréquents, non-seulement par rapport au grand éloignement, mais encore par rapport à la situation particulière où se trouvent les affaires de ces contrées. De nouvelles colonies, comme on l’a déjà observé, sont toujours dépourvues de capitaux ; la masse de leurs capitaux est toujours fort au-dessous de ce qu’elles pourraient employer avec beaucoup d’avan­tage et de profit dans l’amélioration et la culture de leurs terres ; elles ont donc constamment chez elles une demande de capitaux pour plus que ce qu’elles en pos­sèdent en propre, et, pour suppléer au déficit de la masse de leurs propres capitaux, elles tâchent d’emprunter, autant qu’elles le peuvent, de la mère patrie, envers laquelle, par ce moyen, elles sont toujours endettées. La manière la plus ordinaire dont les colons contractent ces dettes, ce n’est pas en empruntant par obligation aux riches capitalistes de la métropole, quoiqu’ils le fassent aussi quelquefois, mais c’est en traînant leurs payements en longueur avec leurs correspondants qui leur expédient des marchandises d’Europe, aussi longtemps que ces correspondants veulent bien le leur laisser faire. Leurs retours annuels très-souvent ne montent pas à plus d’un tiers de ce qu’ils doivent, quelquefois moins ; par conséquent, la totalité du capital que leur avancent leurs correspondants ne rentre guère dans la Grande-Bretagne avant trois ans, et quelquefois pas avant quatre ou cinq. Or, un capital anglais de 1,000 livres, par exemple, qui ne rentre en Angleterre qu’une fois dans un espace de cinq ans, ne peut tenir constamment en activité qu’un cinquième seulement de l’industrie anglaise qu’il aurait pu entretenir s’il fût rentré en totalité dans le cours d’une année et, au lieu de tenir en activité la quantité d’industrie que 1,000 livres pourraient entretenir pendant une année, il n’y tient constamment, employée que celle seulement que peuvent entretenir pendant une année 200 livres. Le planteur, sans contredit, par le haut prix auquel il paye les marchandises d’Europe, par l’intérêt qu’il paye sur les lettres de change qu’il donne à de longues échéances, et par le droit de commission pour le renouvellement de celles qu’il donne à de plus courts termes, bonifie à son corres­pondant, et probablement fait plus que lui bonifier toute la perte que celui-ci pourrait essuyer de ce délai ; mais, s’il peut dédommager son correspondant de sa perte, il ne peut dédommager de même la Grande-Bretagne de celle qu’elle éprouve. Dans un commerce dont les retours sont très-lents, le profit du marchand peut être aussi grand et même plus grand que dans un autre