Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/537

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riches contribuent aux dépenses de l’État, non-seulement à proportion de leur revenu, mais encore de quelque chose au-delà de cette proportion.

Quoiqu’à quelques égards le loyer des maisons ressemble au fermage des terres, il y a cependant un point dans lequel il en diffère essentiellement. Le fermage des terres se paie pour l’usage d’une chose productive[1] ; la terre qui le paie le produit. Le loyer des maisons se paie pour l’usage d’une chose non productive ; ni la maison, ni le terrain sur lequel elle est assise, ne produisent rien. Ainsi, la personne qui paie ce loyer doit le tirer de quelque autre source de revenu distincte et indépendante de la chose pour laquelle elle le paie. Il faut qu’un impôt mis sur les loyers, en tant qu’il tombe sur les locataires, soit tiré de la même source que le loyer lui-même ; il faut que ceux-ci le payent sur leur revenu, que ce revenu provienne de salaire de travail, ou de profit de capitaux ou de rente de terre. En tant que cet impôt tombe sur des locataires, il est du nombre de ces impôts qui ne portent pas sur une seule source de revenu, mais sur toutes les trois sources indistinctement, et il est, à tous égards, de même nature qu’un impôt sur toute autre espèce de denrée consommable. En général, il n’y a peut-être pas un seul article de dépense ou de consommation qui soit plus dans le cas de faire juger de la manière large ou étroite dont un homme règle sa dépense totale, que la quotité de son loyer. Un impôt proportionnel sur cet article de la dépense des particuliers rendrait peut-être plus de revenu qu’on n’a pu encore en retirer jusqu’à présent de la même source dans aucun pays de l’Europe. Si l’impôt, à la vérité, était très-fort, la plus grande partie des gens tâcheraient d’y échapper, autant qu’ils pourraient, en se contentant de logements médiocres, et en tournant vers quelque autre objet la partie la plus considérable de leur dépense.

On pourrait aisément s’assurer avec assez d’exactitude de la quotité du loyer, au moyen d’une mesure de police du même genre que celle

  1. Cette opinion s’accorde avec la théorie d’Adam Smith sur les dépenses productives ; mais elle n’est pas juste. Une maison qu’habite un particulier n’est pas toujours directement productive, mais il est clair qu’elle peut l’être indirectement; car comment la production pourrait-elle avoir lieu, si ceux qui y sont engagés n’avaient pas un abri et les autres avantages que donnent les maisons ? La nourriture, qui fait vivre l’ouvrier, n’est pas plus nécessaire qu’une maison. Si la première est productive, la seconde le sera également.
    Mac Culloch.