Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/644

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tendre à conserver la paix ; et, en second lieu, ce fonds est presque toujours appliqué à quelque autre objet.

Les nouveaux impôts ont été mis dans la seule vue de payer l’intérêt de l’argent emprunté sur eux. S’ils produisent plus, c’est pour l’ordinaire ce à quoi on n’a pas songé ; c’est un produit sur lequel on n’a pas compté, et qui, par conséquent, ne peut pas être fort considérable. En général, les fonds d’amortissement ne sont guère résultés d’un excédent d’impôts levés au-delà de ce qui était nécessaire pour payer l’intérêt ou l’annuité originairement assignée sur ces impôts ; ils sont bien plutôt provenus de quelque réduction subséquemment faite dans cet intérêt. Celui de la Hollande, en 1655, et celui de l’État ecclésiastique en 1685, ont été l’un et l’autre créés de cette manière ; de là vient l’insuffisance ordinaire de ces sortes de fonds.

Pendant la paix la plus profonde, il survient divers événements qui exigent une dépense extraordinaire ; et le gouvernement trouve toujours plus commode de satisfaire à cette dépense, en détournant le fonds d’amortissement de sa destination, qu’en mettant un nouvel impôt. Tout nouvel impôt est senti sur-le-champ plus ou moins par le peuple. Il occasionne toujours quelque murmure et ne passe pas sans rencontrer de l’opposition. Plus les impôts ont été multipliés, plus on presse fortement chaque article d’imposition, et plus alors le peuple crie contre tout impôt nouveau, plus il devient difficile de trouver un nouvel objet imposable ou de porter plus haut les impôts déjà établis. Mais une suspension momentanée du rachat de la dette n’est pas sentie immédiatement par le peuple, et ne cause ni plaintes ni murmures. Emprunter sur le fonds d’amortissement est une ressource facile et qui se présente d’elle-même pour sortir de la difficulté du moment. Plus la dette publique se sera accumulée, plus il sera devenu indispensable de s’occuper sérieusement de la réduire, plus il est dangereux, ruineux même de détourner la moindre partie du fonds d’amortissement, moins alors il est à présumer que la dette publique puisse être réduite à un degré un peu considérable ; plus il faut s’attendre, plus il est infaillible que le fonds d’amortissement sera détourné pour couvrir toute la dépense extraordinaire qui peut survenir en temps de paix. Quand une nation est déjà surchargée d’impôts, il n’y a que les besoins impérieux d’une nouvelle guerre, il n’y a que l’animosité de la vengeance nationale ou l’inquiétude pour la sûreté de la patrie qui puisse amener le peuple à se soumettre, avec un peu de patience, au joug d’un nouvel impôt : de là