Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’hiver ; là Bacchus, toujours livré à ses joyeux transports, marche escorté de ses divines nourrices[1].

(Antistrophe 1 .) Là fleurit chaque jour sous la rosée céleste le narcisse aux belles grappes, antique couronne des Grandes Déesses[2], et le safran doré ; les eaux du Céphise, qui ne s’arrête jamais, serpentent à travers la plaine, et, dans leur cours intarissable, fécondent de leurs eaux limpides le sein de la terre aux plaines fertiles[3] ; les chœurs des Muses et la belle[4] Vénus chérissent aussi cette contrée.

(Strophe 2.) Sur cette terre croit un arbre que ne possède ni l’Asie, ni la grande ile dorienne de Pélops[5], arbre qui ne fut pas planté par une main mortelle, qui vient sans culture, devant lequel reculent les lances ennemies[6], et qui nulle part ne pousse plus vigoureux que dans cette contrée, c’est l’olivier au pâle feuillage, nourricier de l’enfance[7] ; jamais une main étrangère[8] ne pourra l’extirper du sol, car l’œil toujours ouvert de Jupiter, protec-

  1. Les nymphes.
  2. Proserpine et Cérès. Les couronnes de la première se faisaient avec le narcisse, et celles de la seconde avec le safran.
  3. Στερνούχου. Les poètes appellent métaphoriquement στἑρνα et νῶτα, poitrine et dos, les plaines de la terre. Chœrilos de Samos a bien appelé les pierres les os de la terre, et les fleuves, ses veines, γῆς ὸστέα, γῆς φλέβας. Ovide, à son tour, a dit, Métam. I, 393 :
    Lapides in corpore terræ
    Ossa reor dici.
  4. Mot à mot, « Vénus aux rênes d’or, » c’est-à-dire aux parures d’or.
  5. Le Péloponnèse ; du nom de Pelops, qui s’empara de cette partie de la Grèce.
  6. Le scholiaste dit que pendant la guerre du Péloponnèse, les Lacédémoniens, qui ravageaient l’Attique, n’osèrent cependant pas toucher aux oliviers sacrés.
  7. Hésychius rapporte qu’à la naissance des enfants mâles, on suspendait aux portes des couronnes d’olivier. D’autres voient là une allusion aux exercices du gymnase.
  8. Il y a dans le texte : « Aucun chef ennemi, ni jeune, ni vieux... » Ces mots désignent Xerxès, roi de Perse, et Archidamos, roi des Lacédémoniens. Hérodote, VIII, 55, raconte que Xerxès ayant fait brûler l’olivier de l’Acropole, on vit le lendemain, auprès du tronc noirci, un rejeton haut d’une coudée. Selon Thucydide, I, 89, les Lacédémoniens qui envahirent L’Attique sous la conduite d’Archidamos épargnèrent les oliviers sacrés.