Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/294

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ANTIGONE.

Il a fait ce qu’il voulait.

LE CHŒUR.

Quoi donc ?

ANTIGONE.

Il est mort, comme il le désirait[1], sur cette terre étrangère, il y repose couché, dans une ombre éternelle, et y laisse des regrets inconsolables. Car toujours, ô mon père ! mes yeux verseront des larmes sur toi, et rien ne pourra calmer ma douleur. Hélas ! tu n’aurais pas dû mourir sur une terre étrangère, où ta mort me laisse dans l’abandon.

ISMÈNE.

Infortunée ! quel sera mon sort ? triste, délaissée.... et toi, quel sera le tien, sœur chérie,... toutes deux, sans Père, sans soutien !

LE CHŒUR.

Du moins son dernier jour a été heureux, mes amis ; cessez donc vos plaintes, car nul mortel n’est exempt de maux.

ANTIGONE.

(Strophe 2.) Retournons sur nos pas, sœur chérie.

ISMÈNE.

Que ferons-nous ?

ANTIGONE.

Je suis possédée du désir....

ISMÈNE.

Lequel ?

ANTIGONE.

De voir le tombeau souterrain...

ISMÈNE.

De qui ?

ANTIGONE.

De mon père. Hélas !

  1. C’est ainsi que dans Ajax, v. 968, Tecmesse dit du héros : « Ce qu’il désirait obtenir pour lui-même, il l’a obtenu, la mort qu’il voulait. »