Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/367

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ULYSSE.

C’est là tout le trésor de cet homme, que tu passes en revue.

NÉOPTOLÈME.

Ah ! grands dieux ! voici encore, à sécher, d’autres lambeaux tout souillés du sang impur de sa plaie.

ULYSSE.

Plus de doute, c’est ici sa demeure, et il ne peut être loin ; car, souffrant de l’ancienne et fatale blessure[1] de son pied, comment aurait-il pu s’écarter ? Il est sorti pour chercher ou des aliments, ou quelque plante, s’il en a vu quelque part, propre à calmer ses souffrances. Envoie donc cet homme[2] explorer les lieux, de peur que Philoctète survenant ne me surprenne aussi ; car il aimerait mieux me saisir que tous les autres Grecs ensemble.

NÉOPTOLÈME.

Il y va, et il veillera sur le sentier. Pour toi, si tu désires quelque chose de moi, dis-le moi dans un second entretien[3].

ULYSSE.

Fils d’Achille, la mission que tu es venu remplir ici exige que tu sois brave, non-seulement de corps ; mais quoi que mes paroles puissent avoir de nouveau ou d’inouï pour toi, tu dois me seconder, car tu m’as été donné comme auxiliaire.

NÉOPTOLÈME.

Que m’ordonnes-tu donc ?

ULYSSE.

Il te faut séduire l’âme de Philoctète par des paroles trompeuses. Lorsqu’il te demandera qui tu es, et d’où

  1. Κηρὶ, encore dans le même sens, au vers 1166. Voir aussi les paroles de Néoptolème, vers 192-200.
  2. C’est un des soldats qui les accompagnent. Plus bas, au vers 125, Ulysse désignera encore le méme soldat.
  3. Néoptolème réclame ici d’Ulysse l’entretien qu’il lui annonçait tout à l’heure, au vers 24.