Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/37

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MINERVE.

Mais à présent, quoique tu sois près de lui, il ne te verra pas.

ULYSSE.

Comment donc, s’il a toujours ses yeux pour voir ?

MINERVE.

Je couvrirai d’un nuage ses yeux, même clairvoyants.

ULYSSE.

À la vérité, tout est possible, quand un dieu s’en mêle.

MINERVE.

À présent, garde le silence, et reste à la place où tu es.

ULYSSE.

Je resterai, mais j’aimerais mieux être loin d’ici.



MINERVE.

Holà, Ajax, c’est pour la seconde fois que je t’appelle : pourquoi t’inquiètes-tu si peu de celle qui te protège ?

AJAX.

Salut, ô Minerve, salut, fille de Jupiter ! Oui, tu arrives à propos, et je t’offrirai de précieuses[1] dépouilles en l’honneur de cette victoire.

MINERVE.

C’est bien dit ; mais, raconte-moi ceci, as-tu bien trempé ton épée dans le sang des Grecs ?

AJAX.

Je puis m’en vanter, et je suis loin de le nier.

MINERVE.

As-tu aussi porté tes mains armées sur les Atrides ?

AJAX.

Si bien que jamais ils n’outrageront plus Ajax.

MINERVE.

Ils sont morts, si je te comprends bien ?

AJAX.

Morts ! Qu’ils viennent à présent me ravir mes armes !

  1. παγχρύσοις, d’or massif